Carnet de route

Randonnée géologique à la Sainte Victoire

Le 26/11/2023 par Par Marie-Stella Barbez

Rendez-vous à 8h25 sur le parking de l’En Chois.

Il fait froid, mais le soleil resplendit et le vent s’est bien calmé par rapport à la veille. Nous sommes un groupe de 13 personnes avec Edwin comme gentil accompagnateur, Christophe en soutien et Elodie, notre jeune géologue passionnante et passionnée.

Emmitouflés dans nos doudounes, gants et bonnets, nous grimpons gentiment vers le refuge Cézanne en traversant une belle oliveraie. Les olives virent au noir et la vue sur la Sainte Victoire est magnifique. J’ai beau avoir sillonnée la Sainte Victoire dans tous les sens, en toute saison et à diverses heures de la journée, je suis toujours autant émue par sa silhouette, ses nuances de couleur...

En laissant sur notre gauche le hameau du Trou, nous empruntons le chemin marron qui longe le massif sur le premier quart de sa hauteur, grosso modo. Le temps de se découvrir un peu, car la petite montée nous a réchauffés, Elodie nous introduit à la géologie «sainte victorienne». En bonne petite élève, j’ai sorti mon petit calepin et stylo, c’est ainsi que m’échoit ce petit résumé.

Notre belle Sainte Victoire est un massif calcaire constitué de roches sédimentaires. En effet, il y a environ 150 millions d’année, l’océan Téthys est en train de se refermer et des organismes d’origine marine se sont accumulés et compactés (coquillages, crustacés, corail) à environ à 2 à 3 kms de profondeur. Les roches sédimentaires de la Ste Victoire datent de 130 millions d’année. Lors de la période Crétacé, il y a 70 millions d’année, les Pyrénées se sont élevées suite à des mouvements de plaques tectoniques, la plaque ibérique passant sous celle d’Eurasie et entrainant avec elle les montagnes provençales. Il y a eu des ondes de compression en touches de piano, ce qui donne l’aspect actuel du massif avec des failles décalées, des plis et des fentes de tension. Les Alpes sont plus jeunes et datent d’environ 45 millions d’année. Les massifs les plus récents sont ceux de l’Himalaya (environ 20 millions d’année).

En montant, nous voyons des conglomérats (calcaire eux aussi), qui sont des roches détritiques, résultant de la dégradation mécanique d’autres roches et composés de morceaux discernables liés entre eux par un ciment naturel, souvent du grès (sable aggloméré, résultant de la précipitation des sels dissous). Ils ont été formés sur une zone basse de l’océan et de grands fleuves. Lorsque les éléments sont anguleux, on parle de brèche, lorsqu'ils sont arrondis, de poudingue.

Au niveau de l’oratoire de l’Amitié, juste après le départ du chemin vers la grotte des hirondelles, Elodie sort son marteau de géologue et la voilà qui casse du caillou. Elle en sort un bout de calcaire, gris, dur, très compact, qui peut remplacer le silex pour fabriquer des objets. Il a été formé en profondeur dans l’océan où intervient l’acidité  des eaux à cause de l’action de volcans sous-marins. Quand le calcaire est blanc, c’est qu’il a subi des altérations. La bauxite a elle-aussi subi une altération par oxydation lors d’une période de climat humide et chaud. Elle est orangée à cause de sa teneur en oxyde de fer. Les argiles, altérations sédimentaires de roches siliceuses (sable), sont de couleur verte quand il y a du cuivre, bleue du fer ou du cuivre, et violet du fer. Ses teneurs en oxydes dépendent de la concentration des eaux selon le climat de l’époque.

 Les formations rocheuses ne respectent pas toujours les époques géologiques car les mouvements tectoniques ont parfois fait que des roches plus anciennes se retrouvent au-dessus de roches plus récentes.  Et savez-vous que de la roche continue à se former ? Et savez-vous ce que l’on retrouve dans des roches plus récentes aux USA ? Des canettes de coca !!!

Elodie nous met au défi d’imaginer comment certains reliefs ont des formes arrondies. Après bien des suppositions, nous apprenons que ces formes, appelées « slumps », résultent d’un glissement de terrain, comme de la gelée sur un plateau qui penche (belle image !).

Nous bifurquons sur une petite grotte karstique, résultant d’un creusement dû à  l’infiltration de l’eau acide. Au sol de la calcite blanchâtre, résultant d’une précipitation chimique du calcaire avec l’eau, comme pour les stalactites et le tartre dans nos canalisations. Quand elle est orangée, elle contient du fer et c’est de l’aragonite.

Nous arrivons aux anciennes carrières de marbre qui ornent Aix en Provence et même Versailles. L’emplacement creusé pour les barres à mine est encore visible. La roche, qui a été lissée par la coupe, est du poudingue car les inclusions sont anguleuses. Ce n’est pas du marbre géologique. Ce dernier, qui est une roche métamorphique (a subi une transformation physico-chimique due à des modifications de pression, de température et de teneur en eau), est beaucoup plus lourd, dur et se gondole dans le temps.

L’observation de la roche ne nous empêche pas d’admirer le paysage sur la vallée de l’Arc, la chaine de l’Etoile, les monts Auréliens, la Sainte Baume… Edwin nous fait emprunter un raccourci en mode grimpette, juste au-dessus de la carrière et nous nous installons pour le pique-nique. Là, deuxième défi : quelle est cette roche dure incluse dans le poudingue qui dépasse ? C’est du chaille, sorte de silex, qui est une roche siliceuse ayant subi une précipitation chimique. Nous apprenons que le calcaire le rejette et opère une ségrégation minéralogique !!

Nous quittons le sentier marron au Pas du Clapier et une belle petite grimpette nous attend où les mains sont utiles. Arrivés sur la crête et le GR9, d’un coté nos yeux se portent sur la mer et de l’autre sur la neige des Ecrins, le Mont Ventoux... Nous suivons la ligne des crêtes en surfant sur les formations karstiques (érosion hydrochimique et hydraulique du calcaire, roche soluble)  jusqu’au gouffre du Garagaï, puis de la croix en réparation et le prieuré où nous assistons à la remise, assez militaire, d’étoiles à de jeunes scouts, des louveteaux. La descente se fait par le Pas de l’Escalette où la roche est assez glissante due aux passages des nombreux randonneurs. On passe près du Pas du Dinosaure, sachant que ces animaux se sont éteints il y a 65 millions d’année et avaient trouvé ici des conditions favorables sur les berges de fleuves et lacs, à l’époque où existait un climat tropical chaud et humide.

Merci pour cette belle journée à tous et surtout Edwin et Elodie.

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