Carnet de route
Galette des Rois en Haute Provence
Le 06/01/2025 par TROTIGNON LAURENT
Au fil des bulletins météo, je compare différentes options pour aller tirer les Rois tout en randonnant. Le faible enneigement n’exclut pas les plaques de verglas traîtresses ni les vents glaçants. Conduire sur les départementales bas-alpines en janvier n’est pas facile. Exit donc Majastre et le Chiran, Authon et les Monges, le Col de Saint Jurs et le Montdenier. Le Cousson, couronné de sa chapelle consacrée à l’archange Saint Michel, est donc retenu.
Une fois garés à Entrages, nous répartissons les galettes et bouteilles de cidre dans les sacs. Le début du parcours, chemin creux ombragé entre des haies d’épineux, est tapissé d’épaisses plaques de verglas intercalées dans des ornières boueuses. Des chevaux observent nos acrobaties tout en mâchonnant un peu de foin. Au Pas d’Entrages, situé à 2 km du village, nous émergeons franchement de la couche nuageuse qui stagne sur Digne et pouvons admirer le paysage, des Dourbes au Blayeul. Suivant le sentier PR plein Sud, le col coté 1395 m est atteint sans encombre et nous nous hissons d’un bon pas, Céline et Christine donnent le rythme, jusqu’au plateau sommital précédant la chapelle. Nous y faisons halte, le soleil est maintenant présent.
D’un trait nous filons au sommet Sud de la montagne (1512 m) puis descendons plein Nord, dans la lumière rasante et la terre gelée, vers le Col des Estourons (1410 m). L’ascension du sommet Nord (1516 m) est une affaire rondement menée, tirés que nous sommes par nos deux coencadrantes. A l’heure de poser les sacs, un coin de pelouse abrité du vent est trouvé. Posées sur des pierres plates, deux frangipanes et deux couronnes sont sacrifiées, trente deux parts de soleil absorbées. Une fois cette énergie païenne ingérée, nous bousculons quelques broussailles qui barrent la route, taquinons nos genoux sur un raidillon, saluons un petit oratoire dédié à l’archange et atteignons un lieu étrange et envoûtant : les Hautes Bâties de Cousson. On aimerait y rester, alors on y reste, un moment, pour goûter la quiétude, la douceur, la paix. Une fontaine, des arbres immenses, une vieille bâtisse aux fenêtres murées. Une harmonie qu’il est heureux de trouver, parfois, sur son chemin.
Le soleil incline sa chevelure vers la crête touffue, nous devons repartir. Nous remontons d’un bon pas le ravin de Richelme. La partie supérieure de la piste a été ravagée, ravinée, perforée, essorée par une crue du torrent actuellement à sec. La terre est partie, seules subsistent au fond du trou les pierres et la ramure des racines mises à nu. Quel est ce pays, où frappe la nuit une bête capable de modeler et martyriser ainsi la terre ? On a tous quelque chose en nous qui parle de changement climatique … Ainsi marchons nous pensifs, le long de cette griffure dans le sol.
Un réconfort est enfin retrouvé à Digne autour d’une tasse de thé de Noël, un jus de fraise, une mousse, au Barjoc, sympatique bar à jeux, seul café ouvert de toute la ville, endormie près de la Bléone, serpent de pierre qui somnole.
