Carnet de route
Ascension en Ubaye – Saison 2 – La Tête de Crouès
Le 07/06/2019 par TROTIGNON Laurent
Depuis le Gîte du Belvédère de Sainte Anne, nous n’avons qu’un kilomètre de route pour rejoindre la station de ski, point de départ de notre randonnée. Au départ de notre marche (point coté 1811 m), une piste puis une sente nous mènent en traversée légèrement ascendante, plein Sud, vers le hameau du Serre. Ce dernier est habité malgré l’absence de piste carrossable pour l’atteindre. Les prés sont fleuris de coucous, des sources coulent partout, le ciel est limpide. Nous franchissons à gué le Riou du Prat, déjà bien gonflé, puis continuons tout droit vers l’entrée du vallon de Bachasse. Une pause est faite à la sortie de la mélézaie, au premier chalet rencontré vers 2000 m d’altitude. Le vallon se dévoile peu à peu : à notre gauche les pentes Nord, enneigées, de la Pointe Fine et du Brec Aneline, à notre droite le versant du Petit Clausis. L’épine dorsale du Petit Clausis pourrait être une voie d’accès à la Tête de Crouès, cependant les pentes terminales, à l’Est du sommet, sont très raides et croulantes. La voie d’accès la plus sûre à la Tête de Crouès est matérialisée par une épaule qui descend au Nord Est du point coté 2660 m, à l’Ouest du Brec Aneline. Il sera ainsi possible de suivre vers l’Ouest une arête assez tranquille, à l’abri des coulées et d’atteindre la base de l’arête Sud de la Tête de Crouès. Cette dernière arête est déneigée, présente des gradins stables et une pente raisonnable.
Vers 2300 m d’altitude, nous sommes sifflés par les premières marmottes. Nous n’en avions vu aucune la veille à la Tête de Louis XVI, probablement en raison de la présence d’autres groupes de randonneurs. Ici nous sommes seuls, le vallon de Bachasse est à nous, quel cadeau merveilleux !
Au pied de l’épaule donnant accès à la pointe 2660 m, une bonne pause est faite pour expliquer la marche en crampons, le maniement du piolet ainsi que le fonctionnement de la radio VHF. Les gourdes et les réserves de fruits secs sont également consultées. L’épaule est en grande partie déneigée et la pointe 2660 m, rocheuse et couronnée d’un beau cairn, est rapidement atteinte. La vue se dégage largement vers le Mercantour et le Chambeyron, une impression « haute montagne » nous gagne. Neige et rochers se partagent les versants. Nous cheminons à proximité du fil de l’arête, tantôt sur des dalles ou le long de vires, tantôt en traversant des névés accrochés dans le versant Nord. Le dernier névé traversé avant d’atteindre l’arête Sud de la Tête de Crouès n’est pas très épais mais il fait entendre quelques signaux acoustiques au moment où j’ouvre la trace … La neige nous rappelle qu’elle se transforme.
Isabelle est un peu fatiguée, je propose qu’on laisse les sacs au col pour aller ensemble visiter le sommet avant de revenir pique-niquer. L’ascension de l’arête est un jeu d’enfant qui ravit Cathy et Thierry à la découverte d’un nouveau monde. Nous sommes tous rassemblés au sommet de la Tête de Crouès (2928 m), pas un souffle de vent. Christine, Isabelle, Corinne et Cathy sont maintenant convaincues qu’il faut pique-niquer au sommet. Il est vrai que le panorama est superbe. Eric, Daniel, Serge et votre serviteur font fissa un aller-retour sommet-col-sommet pour rapatrier les sacs manquants. Nous prenons le temps de manger, de regarder, de photographier. Le vallon du Bérard que nous dominons de 500 m est infréquentable, barré d’avalanches de plaques, de coulées.
L’idée d’une descente par l’arête Nord, vers le col précédant le sommet des Plastres, est discutée puis adoptée. Au début c’est facile, puis après environ 200 m ça devient assez scabreux, entre névés creux et mous adossés à de raides barres rocheuses et gouffres terreux parsemés de blocs instables. Nous devons battre en retraite : remontée au sommet et retour par le chemin d’arrivée. La moitié du groupe a ainsi gravi 3 fois le sommet, l’autre moitié 2 fois. Aucun regret, ces parcours en arête sont magiques, la météo est stable, nous avons le temps. Nous rendons sa solitude au vallon de Bachasse qui, lui, nous rend au chemin des villages.
Notre prochaine étape passe par Maljasset en Haute-Ubaye, nous sommes attendus au gîte de la Cure. Ce vendredi marque un nouveau cran dans la montée des températures, il faudra partir tôt demain matin, mais pas sûr que cela suffise pour avoir de la neige portante. La Pointe Basse de Marie n’est pas une randonnée difficile, mais permettra-t-elle à des piétons de fouler son sommet ?





