Carnet de route

Gorges de Trévans

Le 04/07/2022 par TROTIGNON Laurent

Matériel et équipement : bâtons de marche, lampe frontale, 6 litres d’eau par personne, quelques vivres de course, vêtements légers, sérum antivenin scorpion/crotale.

Rendez-vous : parking covoiturage de Pertuis, 1h30 du matin

Ainsi pourraient s’énoncer les instructions données aux participants à des randonnées estivales en Haute Provence, d’ici quelques années, lorsque le changement climatique aura exprimé sa pleine vigueur.

De bon matin, le plateau de Valensole est traversé, lavandes en pleine floraison, blés déjà moissonnés. Des jeunes femmes en robe blanche et chapeau de paille, des familles, se font photographier au milieu des serpents mauves qui ondulent vers l’horizon.

Arrivés à 8h00 à l’entrée des gorges, nous nous équipons et franchissons le premier pont sur l’Estoublaisse aux eaux basses et boueuses. Longeant la falaise, notre groupe de 7 marcheurs-cheuses, pénètre sous le couvert des chênes et des pins, dans la profonde entaille où déjà se glissent quelques rais de soleil. La fraîcheur est toute relative, un peu lourde et boueuse comme l’eau du torrent.

Nous retraversons l’Estoublaisse puis le Clovion et prenons la branche du sentier de découverte qui nous dirige vers Valbonnette. Le sous-bois est sec et les buis ont été ravagés par la pyrale, si bien que la vue porte loin entre les troncs droits des pins noirs. A l’ombre de la falaise, nous atteignons Valbonnette, où la sensation de fraîcheur est légèrement plus marquée. Des campeurs sont en train de ranger leur bivouac. Je dirige le groupe vers le sentier qui nous conduira au Pont de Tuf. Tout d’abord tranquille et débonnaire, ce chemin bute sur une barre rocheuse. Elle est surmontée grâce à une escalade facile mais nécessitant quelque attention. Aux traversées d’éboulis, succèdent les passages « avec les mains » ou à l’aide de câbles, des fourrés, des corniches et des promontoires, de courtes descentes suivies de remontées. Nous jouons maintenant à cache-cache avec le soleil et plongeons, enfin, dans la descente en spirale qui atterrit sur le Pont de Tuf. Là, dans la faille ombragée, perchés six mètres au-dessus de l’eau, il paraît fort opportun de faire la pause méridienne, même s’il n’est que onze heures et quart.

La source pétrifiante, à l’origine du ciment qui soude le pont naturel aux racines des arbres, est presque tarie. De nombreuses pyrales volettent autour de nous avant de s’écrouler sur les mousses sèches.

Légèrement réhydratés, nous remontons le ravin du Feston, arrivons en plein soleil et filons vers la cabane ONF des Blaches. Le parcours jusqu’au Gros Jas est une épreuve pour plusieurs d’entre nous, en raison de la chaleur maintenant écrasante et des quelques faux-plats qu’il faut remonter au soleil. C’est là que Thierry nous épate : sortant de son sac un étui, il déploie une élégante ombrelle au revêtement d’aluminium. Sous cet abri, tel un bernard-l’hermite dans sa coquille, nous le voyons sourire comme s’il avait un climatiseur portable. Nous spéculons en souriant sur tous les usages envisageables pour cet accessoire, depuis le four solaire parabolique jusqu’à l’antenne 5G pour zones blanches. Nous voulons tous essayer cette armure.

Empruntant alors la route, nous filons vers le Pas de l’Escale, espérant y trouver plus d’ombre et une vasque d’eau fraîche. Le goudron de la D17 colle à nos chaussures. A l’intention de futurs paléontologues sont ainsi imprimés, dans la couche molle, les pas d’hominidés du début de l’anthropocène.

Un courant d’air tiède nous accueille au Pas de l’Escale, un groupe de baigneurs se rafraîchit dans l’eau trouble sous un soleil au zénith. Trois vautours testent les ascendances d’air chaud côté Montagne de Beynes, tandis que nous rasons la muraille pour profiter de chaque poche d’ombre. Descendus au Pont Romain, nous allons nous réfugier au bord du Clovion sous le couvert de jeunes hêtres. Une pause bienvenue, lors de laquelle une sorte de bain de Smecta est donné à nos pieds ou à nos séants. Nous consultons les gourdes et les Camelbacks dont le niveau baisse inexorablement, les casquettes et chapeaux sont trempés dans l’onde crémeuse et nous voilà repartis.

Un chemin en pente douce, en balcon, des chênes centenaires, des pins noirs et toujours ces buis ravagés, spectres évanescents, presque réduits à l’état de poussière. Le dernier kilomètre, que Dephine et moi annonçons régulièrement au groupe, est le plus long. Heureusement, le sentier est maintenant connu et circule dans la gorge au bord de l’eau.

Au parking, il fait 36°C à l’ombre. Instinctivement nous nous retrouvons à la Bégude, au bar de l’Etape, sous un tilleul et deux parasols, diabolos ou pacalos en main, un léger goût d’argile sur les lèvres. On a eu chaud.

Détails pratiques :

Pertuis-Gorges de Trévans : environ 80 km, 1h20, via Manosque et Valensole.

Le sentier menant de Valbonnette au Pont de Tuf est technique, peu entretenu, parfois exposé et n’est praticable que par beau temps. Ne pas y emmener un groupe de plus de 6 à 8 personnes. Corde pouvant être utile pour des marcheurs peu entraînés. Exposition aux chutes de pierre provoquées en descendant sur le Pont de Tuf côté Ouest.

Circuit d’environ 19 km pour environ 800 m de D+ / 6h30 de marche effective.







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