Carnet de route

De Rouies et d'Olan

Sortie :  COMPLET - "Group' Alpi " - Une semaine en montagne du 01/07/2024

Le 10/07/2024 par Antoine Bentegeat

   Dehors tout est gris. On regarde par la fenêtre comme on regarde par un hublot. Le refuge du pigeonnier émerge de la brume comme un vaisseau pirate. On a l'impression d'être en haute mer, perdu au point Némo. Heureusement il arrive que le voile se déchire, on aperçoit alors l'immense face sombre des Rouies. Ouf, la terre est là, et elle se dresse partout autour de nous.

   Chacun prend ses quartiers, nous y resterons quelques jours. Le pigeonnier est plein d'habitudes et de petits rituels qu'il faut apprivoiser : la météo inaudible donnée par radio, bien racler les plats si on veut du rab, le speech légendaire du gardien au dessert, le petit sucre à 95° pour bien dormir...

   Demain le CAF d'Aix rendra visite aux Rouies. Un groupe attaquera par la voie Normale en passant par le couloir tandis qu'un autre prendra à revers en passant par le col de muande bellone et le pic ouest du Vaccivier.

   Au départ, la nuit est fraîche. On se fait cueillir par un vent glacial qui coule et dévale les pentes depuis les sommets. C'était vraiment pas le moment d'oublier son coupe vent...

   Cette année la neige est particulièrement abondante en altitude ce qui a le double avantage de faciliter grandement les approches et d'apporter au paysage une touche esthétique pas désagréable. On profite de la vue au sommet avant de replonger dans la brume pigeonnesque. Une belle journée d'échauffement pour tout le monde.

   Le jour suivant c'est au tour du gendarme rouge de se faire assiéger. Un détachement ira par l'arête SSW et un autre par la directe de Ça Roule. On voit les copains qui se régalent dans Ça Roule. Pour nous ça roule moins bien : on s'égare dans un réseau de dièdres, les rares pitons disparaissent sous le Génépi et le rocher est plus que douteux... L'apesanteur en rappelle plus d'un. Dans le début d'après midi le pic central du Vaccivier est encore bien loin : les cordées se retrouvent pour redescendre dans un système de vires peu engageantes. Cela doit faire un moment que personne n'est passé par là. Une journée "formatrice" comme on dit quand tout ne s'est pas passé comme prévu.

   Le dernier soir au pigeonnier est un soir de fête. Le gardien nous a laissé la bouteille de Génépi. Comme on a pris l'habitude de bien finir les plats, la bouteille ne fait pas exception. On se dit qu'on aura peut-être du rab.

   Jeudi il fait plus que beau. C'est le jour de transit entre le pigeonnier et le refuge de l'Olan. A priori rien de compliqué. Mais l'après-midi s'annonce chaude. Certains passent par la case champsouillette au Gioberney. Il faudra leur demander comment s'est passée la digestion dans la montée à l'Olan en plein cagnard. Tout le monde tire la langue. Et comme si ça ne suffisait pas on est à deux doigts de se faire tirer les oreilles par la gardienne qui a lancé le repas pour 18h45. Un peu juste pour l'élite du CAF d'Aix qui commence à prendre goût à un rythme un plus pépère.

   Demain c'est la journée à ne pas manquer, les conditions météo sont parfaites. Trois cordées du CAF partent à l'Olan par la voie Escarra et on envoie nos meilleurs éléments dans la célébre Oiseau de passage.

   L'Olan se mérite, à chaque instant, à chaque pas. Ce sera notre Vietnam à nous, notre enlisement record. Pourtant tout commençait plutôt bien. L'horaire d'approche était tenu, l'enneigement exceptionnel permettait d'économiser une longueur de rocher, les premières dalles se franchissaient facilement en enfilant les relais comme des perles. La suite était sensée être débonnaire : une rando sur une vire légèrement ascendante et plutôt tabulaire. Mais la vire est barrée par des névés couchés en travers du chemin, raides, expo et bétons. Contourner en sécurité prend plus de temps que prévu, mettre les crampons aussi. Quand on pense à regarder la montre, il est déjà 10h et on a pas atteint la brèche. On sait que le sommet est hors de portée. Autant pique niquer avant la descente. On profite du spectacle impressionnant que nous offre les copains suspendus dans la face sud. Encore une belle journée bien formatrice.

   Quand on rentre le refuge est désert. Ça annonce du mauvais temps pour demain. Il n'y a que la gardienne qui essaye de comprendre ce qu'on a fabriqué. J'ai du mal à lui faire croire qu'en 12h de course on a même pas atteint la brèche. Elle pense que je me fou de sa gueule. Elle me répond d'une manière où je sens pointer l'ironie que le guide qui a fait la même course que nous doit déjà être rentré à Gap à l'heure qu'il est...

   Heureusement qu'il y a la cordée dans Oiseau de passage qui lui redonnera un peu de considération pour notre groupe. Mais la cordée, plus soucieuse de prendre du bon temps que de s'occuper de la réputation du club, rentre à 19h. La soupe est presque servie. Au dîner la gardienne nous dit qu'elle gardera un grand souvenir de nous comme des cordées exceptionnellement lentes.

   Le mauvais temps se confirme pour demain. On abandonne l'idée de faire la Cime de vallon. Tout le monde redescendra sous une légère pluie. C'est un temps parfait pour une champsouillette. Quoi de mieux pour clore cette belle aventure ?

Encore une semaine en montagne incroyable avec des encadrants et des encadrés en or. Merci pour tous ces beaux moments partagés ensemble dans des paysages exceptionnels.

   Antoine







CLUB ALPIN FRANCAIS AIX EN PROVENCE
MAISON DES ASSOCIATIONS
1 RUE EMILE TAVAN
13100  AIX EN PROVENCE
Contactez-nous
Tél. 04 42 27 85 65
Permanences :
jeudi 19:00 - 20:00 (Permanence fermée pendant les vacances scolaires)
Agenda