Carnet de route

Bivouac Sud Ecrins - Pointe de Serre
Le 27/05/2025 par Laurent TROTIGNON
L’équipe recrutée pour cette aventure printanière se compose en fin de compte de cinq personnes : Olivier, Didon, Clarisse, Thierry et votre serviteur. La préparation de longue date ainsi qu’une reconnaissance faite huit jours auparavant se combinent heureusement avec une météo favorable.
Grâce au superbe van d’Olivier, qui nous accueille avec les sacs ventrus, contenant le matériel de bivouac, les repas ainsi que les accessoires de la randonnée alpine, la route vers Savines est agréable . La piste qui conduit à Clot Bouffier (1651 m), sur les flancs du Mont Guillaume, nous économise heureusement 400 m de dénivelé. Avant de charger nos larges épaules, nous pique-niquons dans une clairière. Une bonne partie de la montée se fait sous les mélèzes le long d’un chemin balisés d’orchidées dominant de haut le torrent de Reyssas. Nous émergeons de la forêt vers 2000 m d’altitude dans le bas du Vallon de la Baume, face à une cascade en voile de mariée. Un gazon parsemé de soldanelles remplace la neige, les mélèzes sont en fleurs. Des ravins, où gisent des névés craquelés, jaillit une eau vive et indomptable.
Un gué à fort débit est franchi par notre caravane de funambules puis nous montons plein Nord vers le col de Reyssas. Didon a trouvé là, près de la cabane pastorale (2161 m), un excellent bivouac : épais matelas de crottes séchées sur lequel pousse une moquette fleurie, table de pique-nique, eau à proximité, vue imprenable sur le lac de Serre Ponçon, …
Dans la salle à manger, confortable, spacieuse, lumineuse, ronronnent les réchauds. Les abris de toile sont déjà montés, prêts à nous accueillir. L’ombre avale les crêtes, sacs et chaussures sont mis à l’abri, chacun rejoint son duvet, en bas dans la forêt aboie un chevreuil, j’observe la Voie Lactée depuis la lucarne de mon duvet.
Je m’active depuis un moment. Les capsules de goretex s’ouvrent une à une. On avait dit 7 heures non ? Eau qui chauffe, gourdes à remplir au torrent, toiles à plier, guêtres à serrer, petit tube de crème solaire à retrouver, les tentes et duvets sont planqués sous l’abreuvoir retourné. Nous partons vers le col de Reyssas, le soleil nous a déjà retrouvés. Mais Olivier, qui a mal récupéré pendant la nuit, est en difficulté. Didon le prend en charge et retourne avec lui à la cabane pastorale où il pourra se reposer en sécurité. Clarisse, Thierry et votre serviteur repartent vers le Col de Reyssas et la crête de vallon Pion.
Vu de près, depuis cette crête, notre objectif, la Pointe de Serre, ressemble au Makalu vu de loin. La neige, abondante au dessus de 2500 m en cette fin mai, donne un caractère himalayen à notre randonnée. Pourvu que l’on reste à distance raisonnable de la corniche dominant le vallon du Tissap et que l’on évite les zones où le névé est trop fin, la progression reste sûre et rapide. Nous voici au pied de l’arête Est ; une vire ascendante sur la gauche dessine, en terrain mixte, un chemin naturel que nous suivons, casqués en bonne et due forme. Un zig et un zag nous ramènent ensuite sur le fil de l’arête jusqu’au sommet de la Pointe de Serre (2909 m), très enneigé et festonné de corniches meringuées. Une vacation téléphonique avec Didon permet de confirmer que tout va bien de part et d’autre, il est treize heures, un casse-croûte plus tard nous redescendons l’arête Est de notre Makalu, traversons les vastes névés peu inclinés qui nous permettent de filer bon train vers Didon et Olivier. Une halte pour laver les crampons au ruisseau et nous voici tous rassemblés autour d’une tasse fumante, raboutant et partageant nos récits.
Nous suivons maintenant le fil de l’eau dans le sens du poil, chargés, en plus du sac, d’images et de souvenirs. Bientôt les rhododendrons seront en fleurs, les ancolies et les grandes gentianes, nous avons tous envie de revenir les voir. Rien n’empêche le temps de filer et, comme tout un chacun, le Cafiste est emporté par son destin de nomade, ponctué d’une halte dans un bar (à Tallard cette fois), point de suspension avant de nouvelles aventures.
Remerciements : à Olivier pour nous avoir transporté en First dans son van, à Didon pour avoir trouvé le bivouac, pris en charge Olivier et permis au reste du groupe de réussir l’ascension, à tous pour la bonne ambiance de cette sortie.
Infos pratiques :
Garer la voiture à proximité de Clot Bouffier est commode, attention aux pierres qui peuvent encombrer la chaussée. En été, présence de troupeaux.
La montée finale vers la Pointe de Serre (sommet Est) est assez raide (35/40°) et nécessite de l’attention pour s’adapter aux conditions du moment. Le port du casque est nécessaire. Le piolet a été utile pour tailler quelques marches en bord de névé (sous couche gelée).